l'arrière son d'une douleur...
Le bonnet d'âne se porte volontiers à posteriori. C'est même une décoration qu'on s'octroie couramment en société. Elle vous distingue de ceux dont le seul mérite fut de suivre les chemins du savoir balisé. Le gotha pullule d'anciens cancres héroiques. On les entend, ces malins, dans les salons, sur les ondes, présenter leurs déboires scolaires comme des hauts faits de résistance. Je ne crois, moi, à ces paroles, que si j'y perçois l'arrière-son d'une douleur. Car si l'on guérit parfois de la cancrerie, on ne cicatrise jamais tout à fait des blessures qu'elle nous infligea. Cette enfance-là n'était pas drôle, et s'en souvenir ne l'est pas davantage. Impossible de s'en flatter. Le cancre sait, au fond de lui, qu'il aurait fort bien pu ne pas s'en sortir. Les cancres perdus à vie sont les plus nombreux. J'ai toujours eu le sentiment d'être un rescapé.
( " Chagrin d'école " de Daniel Pennac )